Pater Josef Kentenich Portraits

Il faut du temps et de la patience à celui qui désire vraiment rencontrer le Bon Dieu. Car le passage des sollicitations de notre quotidien à « l’océan » de l’amour miséricordieux de Dieu peut durer longtemps.

Mais d’autre part, il n’est pas rare qu’au début d’un tel chemin, Dieu donne quelque chose de particulier afin que nous ayons confiance en Lui.

Une jeune femme raconte que, durant ses études, elle s’était bien entendue avec un de ses camarades, sans que cela soit devenu une amitié plus étroite. Puis elle a poursuivi ses études à Paris, et lui aux Etats-Unis. Ils avaient le numéro de portable l’un de l’autre, mais n’entretenaient pas de contact régulier. Un après-midi, cette jeune femme était assise dans une église de Paris devant une statue de Marie. Elle eut le désir de savoir comment devait se poursuivre sa vie. Alors elle pria la Mère de Dieu de lui montrer si elle devait reprendre un contact plus intense avec le jeune homme aux Etats-Unis, ou si elle devait prendre un autre chemin. Après quelques minutes, alors qu’elle quittait l’église, son téléphone sonna : c’était le jeune homme, qui lui fit savoir qu’il aimerait bien la fréquenter davantage. Plusieurs mois après – entre temps, ils étaient devenus amis – elle lui demanda ce qui s’était passé ce jour où il l’avait appelée. « C’était en plein pendant la conférence », dit-il. « Tout à coup, j’ai pensé à toi, et c’était comme une pression intérieure : « Si je ne l’appelle pas tout de suite, elle est perdue pour moi ». Alors je suis immédiatement sorti de l’amphithéâtre et je t’ai appelé. » La jeune femme en fut profondément saisie, elle le sentait : Dieu est à l’œuvre dans ma vie avec son amour.

Nous devons « saisir là où Dieu nous a rencontrés, et là où il nous a aimés », dit le Père Kentenich, alors qu’il vient juste d’être libéré du camp de concentration de Dachau. Il attend dans un village du Jura souabe de pouvoir rentrer à Schoenstatt. Là, il rappelle aux habitants ébranlés par la guerre comment, dans les effrois de ce temps, ils ont fait l’expérience de la chaleur de l’amour de Dieu : l’ennemi se trouvait juste aux portes du village, mais pourtant ils s’en sont bien sortis. Il les exhorte à recevoir chaque jour personnellement les petits et les grands signes de l’amour de Dieu.

Il raconte qu’il l’a fait « chaque soir auprès des prêtres à Dachau pendant un an et demi ». Et cela les a aidés à survivre dans l’inhumanité du camp.

Apprendre à tenir bon dans les chemins mystérieux de Dieu

Pourtant, il n’est pourtant pas rare que nous voyions les miséricordes de Dieu autrement que nous pourrions les désirer. Le Père Kentenich rappelle aussi aux gens du Jura que, du côté d’Ulm, des gens qui avaient une ferme confiance dans l’aide de Dieu et de la Mère de Dieu, n’avaient pas été préservés des bombes, du feu et des ruines. « Dans la vie, il y a beaucoup de choses inexplicables. Nous ne devons jamais compter à la manière des enfants de ce monde : Seigneur Dieu, je te donne deux centimes, et tu me donnes en échange mille euros », dit-il.

Dans de telles situations, il est difficile de croire que Dieu offre encore maintenant sa miséricorde. Dieu agit souvent dans notre vie « avec un visage fortement voilé », comme le dit de manière imagée le Père Kentenich. Dieu est souvent incompréhensible dans ses plans. Savoir « apprécier » ou « considérer » ses dispositions providentielles peut alors souvent consister seulement à se tenir devant ce caractère incompréhensible de Dieu, et à demander : « pour quoi ? ». Puis nous devons lui demander de nous donner au moins un peu de lumière. Dans de telles situations, notre relation à Dieu menace de se briser, si en même temps, nous ne gardons pas à l’esprit les heures où il nous a comblés de manière surabondante.

L’écrivain russe Léon Tolstoï écrit : « Si tu ne crois plus au Dieu auquel tu croyais jusque là, cela tient au fait que dans ta foi, quelque chose n’allait pas, et tu dois t’efforcer de mieux saisir ce que tu nommes « Dieu ». Quand un sauvage cesse de croire à son dieu de bois, cela ne veut pas dire que Dieu n’existe pas, mais seulement qu’il n’est pas en bois ! » Dieu est autre que ce que nous pensons souvent. Nous devons nous embarquer avec Lui tel qu’Il est, pour Le rencontrer réellement.

L’eau porte

« Nager » dans la mer de la miséricorde de Dieu n’est jamais facile. Dans notre vie, il reste des incompréhensions et de la souffrance. Mais celui qui, dans les expériences douloureuses, recherche fidèlement les signes de la bonté de Dieu, celui-là, Dieu ne le laisse pas tomber. Il est capital de tenir bon, de ne pas s’aigrir lors des expériences amères, de ne pas se donner pour battu dans les coups du sort.

Un témoin digne de foi

Le Père Kentenich est toujours revenu à cela : percevoir les signes de l’amour de Dieu dans nos vies peut devenir très difficile. Mais Marie est une bonne mère, elle peut nous aider à découvrir la miséricorde de Dieu même dans l’obscurité. Quand il enseigne aux gens du Jura souabe ce genre de « contemplation », il leur indique Marie, et ajoute : Ce n’est pas n’importe quel jeune prêtre dans son enthousiasme qui vous le dit, mais quelqu’un qui revient justement de l’enfer de Dachau. Il a lui-même mesuré à quel point l’alliance d’amour avec Marie ancre dans l’amour de Dieu même dans les temps les plus difficiles. La vie du Père Kentenich donne le courage de s’abandonner à ce Dieu d’amour :

 

« Nager dans l’océan de la miséricorde de Dieu, cela doit être notre mission ».

J. Kentenich